V.
L’intrusion des exigences managériales dans la vie privée des salariés ne constitue pas un phénomène nouveau. En 1914, Henry Ford dota son entreprise d’un « département de sociologie » spécifiquement dévolu à la surveillance des ouvriers afin de statuer sur leur éligibilité à son « programme de partage du profit » : dépenses et consommations, hygiène et moralité, activités politiques et syndicales étaient alors passées au crible d’inspecteurs qui n’hésitaient pas à se rendre au domicile des travailleurs et à interroger épouses et voisins[1].
Si les effets d’insistance du débat public sur le travail tendent à masquer les continuités au profit des ruptures, la question de l’emprise de la vie professionnelle sur la vie privée ne se pose pas moins aujourd’hui de façon particulièrement aiguë, que l’on doit notamment au développement des technologies de l’information et de la communication, qui garantissent la disponibilité du salarié hors de son lieu de travail tout en permettant d’en étendre la surveillance, mais que l’on doit tout autant au renforcement des protections dont bénéficie la vie privée dans le droit civil comme dans celui du travail et aux arbitrages constants que nécessite désormais l’application de la loi au vu des pratiques managériales, nouvelles ou anciennes.
Si la restriction du droit au respect de la vie privée peut se voir justifiée légalement par la nature des tâches et de la fonction du salarié au sein de l’entreprise, il est toutefois des circonstances où l’abus est caractérisé et suscite de véritables scandales, comme ce fut le cas en mars 2008 lorsque le magazine Stern révéla les méthodes d’espionnage mises en œuvre par la direction de Lidl :
[Des] détectives privés ont été mandatés par la direction pour surveiller plusieurs centaines de magasins, en 2006 et 2007, et ont retranscrit les moindres faits et gestes des employés, heure par heure, observés à l’aide de caméras miniatures dissimulées. […]
Au siège de Neckarsulm, dans le Bade-Wurtemberg, le patron de Lidl recevait chaque semaine le rapport de surveillance d’un nouveau magasin et savait par exemple que sa caissière de Hanovre comptait « une majorité de drogués dans son cercle d’amis ». La direction savait aussi que Mme J. participait à « des réunions Tupperware le vendredi après-midi », ou encore que sa collègue n’avait « jamais payé la redevance télé ». De leur destination de vacances à leurs tracas personnels, rien ne lui échappait. Pas même les « odeurs » de Mme Z. qui « arrive au magasin à vélo, avec son uniforme trempé de transpiration ». À quelles fins la direction de Lidl a-t-elle fait surveiller ses magasins ? Officiellement « pour lutter contre les vols ». […]
Les rapports de plusieurs centaines de pages récupérés par Stern sont cependant sans ambiguïté. Lidl espionnait bien ses salariés dans leur intimité. Et lorsque Mme N. faisait circuler parmi ses collègues le Livre noir du syndicat Verdi, en juin 2007, l’œil attentif de Big Brother l’avait aussitôt remarqué. « Dans le livre, j’ai identifié les notes à la main de Mme N. », confirme l’agent de surveillance dans son rapport à la direction[2].
De façon assez attendue, les écritures dramatiques consacrées au monde du travail prêtent une grande attention à la porosité des frontières entre vie professionnelle et vie privée. Écrite en 1971, La Demande d’emploi de Vinaver est sans doute celle des pièces qui en a exploré l’intrication de la façon la plus systématique en jouant sur l’enchevêtrement des échanges domestiques (entre Fage, sa femme Louise et sa fille Nathalie) et de l’entretien d’embauche (entre Fage et Wallace), ainsi que sur la coprésence scénique permanente de tous les personnages (Fage, cadre au chômage, mari et père, ne cessant dès lors d’être sous le double regard de sa famille et du recruteur). Outre les effets délétères de la perte d’emploi sur la vie privée – et l’équilibre psychique – de Fage, ce dispositif formel met en valeur la dimension inquisitrice de l’entretien qui structure toute la pièce :
Wallace. Votre vie privée […]
Je veux être bien précis elle ne nous concerne pas […]
Autrement que par l’incidence qu’elle peut avoir sur votre activité professionnelle […]
Si nous tenons à en avoir un aperçu si par exemple il nous importe de savoir que le candidat a une vie privée turbulente ou au contraire rangée […]
Mais ça n’implique aucune exclusive a priori je ne disqualifie pas le don juan celui qu’on appelle vulgairement le baiseur […]
Ni l’impuissant ni du reste j’ai embauché le mois dernier un homosexuel […]
Il s’agissait d’un poste de confiance mais son homosexualité déclarée entrait dans une structure dynamique dans laquelle les tensions s’équilibraient harmoniquement inversement je me méfie souvent de l’individu normal[3]
De fait, rien n’est négligé par Wallace qui adopte tour à tour les postures du médecin, du psychologue, du psychanalyste, du directeur de conscience et de l’inspecteur de police : les compétences et le parcours professionnels de Fage, mais aussi bien son histoire personnelle et ses traumatismes enfouis, ses relations familiales, ses hobbies, ses manies, l’heure à laquelle il se lève, les lieux où il va en vacances… tous ces éléments sont dûment enregistrés afin d’aboutir à un portrait-robot qui permettra de diagnostiquer l’aptitude du candidat à intégrer l’entreprise.
Alors que nous ne sommes qu’au début des années 1970, l’humanisme new age dont se prévaut le recruteur pour justifier le degré de précision de ce qui se donne comme une très exhaustive enquête de personnalité annonce un déplacement essentiel dans le cadre de l’évolution des pratiques managériales, soit le primat du « savoir-être » sur le « savoir-faire » fondé sur l’engagement total que l’entreprise exige de ses salariés[4]. Le caractère pour le moins ambigu de ces nouvelles méthodes qui s’autorisent de leur intérêt pour « l’humain » pour mieux le convertir en « ressource » et en « capital » devient patent lorsque la pièce de Vinaver s’émancipe des voies ritualisées de l’entretien d’embauche et ménage des décrochages qui en exhibent la violence et l’asymétrie :
Wallace. Vous arrive-t-il de vous dégoûter de votre personne ? Quand vous avez été lâche avec un de vos collaborateurs ? Lâche avec votre femme ? Lâche avec votre fille ? Quand vous savez que vous avez trahi une certaine idée de vous-même ? Ça nous arrive à tous n’est-ce pas ? Quand vous étiez enfant aviez-vous déjà cette habitude de mastiquer ? Avez-vous du mal à vous contrôler ? Souhaitez-vous que j’ouvre un peu la fenêtre ? Êtes-vous avec les femmes dans l’intimité acharné après la performance ? Manquez-vous de patience quelquefois ? De discernement ? Vous souciez-vous de leur plaisir ? Vous repliez-vous sur vous-même après le plaisir ? Dans quelles choses prenez-vous le plus de plaisir ? Jusqu’où vous porte le désir ? Quel est votre plus fort désir[5] ?
Plus de quarante ans plus tard, on retrouve semblable feu de questions dans For the disconnected child de Falk Richter, lors de l’entretien d’évaluation que les deux consultantes Luise Sommer et Tatjana Winter font subir à Markus Mayer :
Luise Sommer. Vous pouvez partir du principe que dans les deux heures qui viennent […] vous aurez à répondre à des questions précises […]
Tatjana Winter. Cela peut sembler parfois un peu envahissant…
Luise Sommer. Mais cela nous sert à vraiment visualiser intégralement la structure de votre personnalité, je veux dire au sens de « qui êtes-vous vraiment tout au fond de votre intériorité et comment l’entreprise et vous, donc votre intériorité dirais-je, pouvez vous vous rencontrer encore mieux » […]
Vous êtes marié ?Markus Mayer(rit). Non
Tatjana Winter. Vous vivez une relation stable ?
Markus Mayer. Là en ce moment plutôt pas non (rit)
Luise Sommer. Combien de temps a duré votre dernière relation ?
Quatre mois ? C’était quand ? […]Tatjana Winter. Alors en ce qui concerne la proximité et les peurs de se lier. Serait-ce un point où vous diriez : là, j’ai besoin de me développer ? […]
Luise Sommer. […] [Nous] cherchons ici des gens qui sont prêts à s’engager dans une relation à long terme avec l’entreprise et en cela les relations amoureuses peuvent justement proposer un très bon terrain pour s’exercer pour optimiser ces techniques c’est-à-dire la capacité à créer du lien capacité d’identification changement de perspective enfin se projeter à chaque fois en l’autre avec ses désirs, ses motivations […]
Parlons vie privéeTatjana Winter. Aujourd’hui, quand vous rentrez à la maison, qui vous y attend ?
Luise Sommer. Est-ce qu’il y a quelqu’un ?
Tatjana Winter. Quelqu’un en qui vous avez confiance, qui est là pour vous ?
Luise Sommer. Quand vous étiez enfant, aviez-vous souvent la sensation de ne pas vraiment faire partie du monde qui vous entoure ?
Tatjana Winter. De ne pas être suffisamment pris dans les bras ?
Luise Sommer. D’être absent les choses devenaient insupportables[6] ?
Mais c’est sans doute dans Contractions que cette emprise sur la vie privée atteint son paroxysme, comme en témoigne d’ores et déjà le titre de la pièce où se trouvent amalgamées les affres de l’employée sous contrat et celles de la mère qu’elle va bientôt devenir puis tragiquement cesser d’être. Le moteur de la fable est ici fourni par le paragraphe 5 du contrat qu’a signé Emma lorsqu’elle a été recrutée :
Aucun employé, chef de service ou directeur de l’entreprise ne doit s’engager avec aucun autre employé, chef de service ou directeur de l’entreprise dans aucune relation, activité ou acte qui soit entièrement, principalement ou partiellement de nature qui puisse être qualifiée de sexuelle ou d’amoureuse, sans informer au préalable l’entreprise de ladite relation, activité ou dudit acte[7].
S’il ne se pratique pas en France, ce mode de contractualisation est d’usage courant aux États-Unis où les entreprises peuvent exiger de leurs employés qu’ils signent une déclaration officielle visant à les prémunir contre des poursuites en harcèlement sexuel (« consensual relationship agreement », plus communément appelé « love contract »[8]), et où certaines d’entre elles vont jusqu’à interdire toute relation personnelle en leur sein.
Selon un protocole répétitif qui accuse la dégradation de la situation initiale, les quatorze scènes qui composent la pièce de Mike Bartlett confrontent Emma et la manager dans le bureau de cette dernière. S’y déroulent des entretiens de plus en plus intrusifs et directifs qui suivent pas à pas l’évolution de la relation d’Emma et de son collègue Darren, depuis leur premier flirt à l’issue d’un dîner jusqu’à la mort de leur enfant en passant par leur premier rapport sexuel :
La manager. Qu’avez-vous pensé de l’acte sexuel ?
Emma. Je vous demande pardon ?
La manager. L’acte sexuel. Comment le décririez-vous ? Est-ce que c’était bien ?
Emma. Je n’ai pas à vous dire ça.
La manager. C’est important que nous sachions quel type de relation vous avez. Une relation amoureuse avec peu ou pas de sexe crée une dynamique de bureau totalement différente d’une relation entre deux collègues ayant une vie sexuelle satisfaisante et régulière. Donc il est important pour nous de savoir comment c’était.
Emma. Mais je n’ai pas à vous le dire ?
La manager. Non. Si nous n’avons pas les faits, nous nous appuierons sur des estimations. Des hypothèses. Préférez-vous que j’émette des hypothèses ?
Emma. C’était bien.
La manager. Bon. (Un temps.) Darren a dit « excellent ». Peut-on s’entendre sur, disons, « très bien » ?
Emma. D’accord.
La manager. Bon. Je demanderai à Darren de confirmer[9].
Comme on peut le constater, il ne s’agit pas seulement d’obtenir « une photographie exacte »[10] des rapports qu’entretiennent les membres du personnel. Le souci de transparence de l’entreprise se double d’un droit d’ingérence qui va directement influer sur le cours des événements en exigeant la rupture du couple, puis en décidant de la mutation de Darren à Kiev en vue de réduire tout « contact social inutile sur le lieu de travail »[11]. Mêlant injonctions comminatoires et civilités d’usage, les duels à fleurets mouchetés entre la manager et sa subordonnée suivent la courbe tragique d’une reddition, jusqu’à ce qu’Emma, privée de tout ce qui faisait sa vie en dehors de son travail, puisse à nouveau se dévouer « corps et âme » à ce dernier.
Si la surveillance de la vie privée des salariés par l’entreprise constitue un enjeu récurrent, notons qu’il est tout aussi fréquent que la vie professionnelle s’immisce dans la vie privée et fasse elle-même l’objet d’une surveillance domestique méticuleuse. Tandis que Fage, dans La Demande d’emploi, ne cesse de vivre et de rêver sous le regard scrutateur du directeur du recrutement, c’est également sous celui de son épouse qu’il mène son entretien d’embauche, et la pression qui s’exerce sur le cadre au chômage est incontestablement bilatérale. Comme Wallace, Louise examine Fage sous toutes les coutures, elle inspecte ses costumes lorsqu’il part pour ses entretiens (« Tu es parti tout crotté »[12], « J’entendais aussi donner un coup au pli de ton pantalon »[13]) et le questionne lorsqu’il en revient tout en formulant à mots mal couverts sa crainte de voir se dégrader ses conditions de vie (« j’ai besoin que tu me rassures »[14], « pourvu qu’on ait de quoi manger et où coucher un petit endroit chaud parce que je suis frileuse il faut que ce soit chauffé chéri c’est tout ce que je demande »[15]).
Dans Conviction intime, ce phénomène franchit un nouveau seuil et montre une femme obsédée par l’évolution professionnelle de son mari.
L’homme. Je pars.
La femme. N’oublie pas de prendre en compte l’extension des besoins dans ta gestion de clientèle car les freins gênant les échanges potentiels ne doivent pas t’empêcher d’optimiser le flux de valeur ajoutée.
L’homme. Je pars.
Il sort[16].
Contrastant avec la longueur des monologues de l’homme lors de ses errances solitaires et celle des tirades de la femme lorsqu’elle dialogue avec sa voisine de palier au sujet de l’ascension sociale fulgurante de son mari, la brièveté des échanges conjugaux témoigne du fossé qui sépare les deux époux et qu’a d’emblée creusé le mensonge inaugural de l’homme, laissant croire à sa promotion alors qu’il venait d’apprendre son licenciement.
Dans le contexte – à peine ? – dystopique de la pièce État d’urgence, la surveillance qu’exerce la femme sur les performances de son mari se montre beaucoup plus efficace, d’autant qu’elle se fait avec l’entière complicité de l’entreprise où il travaille :
La femme. Tes performances sont en baisse, ils ont fait le calcul […]
Ça ne te fait plus plaisir, tu n’aimes… plus ton travail et ça… ils le sentent et ils se demandent pourquoi, parce que ton travail est resté le même, donc apparemment c’est plutôt lié à toiL’homme. J’ai du plaisir
La femme. Et ils veulent savoir ce qu’on pourrait faire
L’homme. J’y prends du plaisir
La femme. Ils ont eu un ou deux entretiens avec l’équipe, posé des questions individuelles et… et ici aussi, dans le lotissement, ils ont interrogé les voisins… ils ont regardé ton évaluation vidéo, l’ensemble des évaluations des quinze dernières années. […]
Ils disent que tu ne ries presque plus, tu… ne t’amuses plus au travail, tu liquides ton travail… de manière hésitante et tu regardes beaucoup par la fenêtre, trois à quatre minutes par heure en moyenne. Tendance en hausse.Bref silence.
Mais qu’est-ce que tu y cherches ? […]
Tes résultats sont en chute… […] les clients ne veulent plus de rendez-vous avec toi, tu as de moins en moins de rendez-vous […]
3,45 pourcent de moins que le mois dernier […]
4,13 pourcent de moins que le mois précédent, tu te relâches, bientôt… bientôt tu n’existeras plus, les chiffres… parlent contre toi… tu ne convaincs plus tes clients, parce que… parce que oui… qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce qui se passe, quoi[17] ?
C’est parfois la vie privée elle-même qui se trouve contaminée par les exigences, les valeurs et les rythmes de la vie professionnelle. Ce qu’Eva Illouz a appelé « le capitalisme émotionnel » se caractérise en effet par un double mouvement « dans lequel les affects deviennent une composante essentielle du comportement économique et dans lequel la vie émotionnelle – particulièrement celle des membres des classes moyennes – obéit à la logique des relations et des échanges économiques »[18]. De cette obéissance, on observe les indices dans l’obsession transversale de l’excellence qui anime l’ingénieure roumaine de Pulvérisés, lorsqu’elle traque les moindres faits et gestes de sa baby-sitter par webcam interposée ou interroge son fils sur ses résultats à l’école[19]. On en repère également les indices dans les œuvres de Falk Richter où les couples sont placés sur un marché hautement concurrentiel qui les conduit à la perpétuelle « réévaluation » de la « rentabilité » de leur « investissement » :
je ne sais pas si tu es vraiment l’homme pour qui il est rentable de montrer tant d’investissement
je ne suis pas sûre à la fin de la journée de récupérer ce qui j’investis ici de toutes mes forces et de toutes mes précieuses vie et énergie
est-ce que cette entreprise sera rentable ?
est-ce que je devrais mieux m’en assurer ?
cultiver parallèlement d’autres options de relation de qualité fondées sur un respect et une compréhension mutuelles
juste au cas où
juste au cas où[20]
Enfin, l’ultime étape de ce processus d’interpénétration est atteinte lorsque la vie privée se trouve réduite à un champ de ruines, autre leitmotiv des écritures contemporaines consacrées au travail : pornos et soupes en sachet pour Jean Personne dans Sous la glace, abstinence et surgelés mangés à même la barquette pour l’Évaluée dans Burnout, chips, pizza tiède et consultation intensive de sites hard pour Frank dans Push up… Misère affective, frustration sexuelle et troubles obsessionnels compulsifs constituent les symptômes récurrents de ces CSP+ entièrement dévoués à leur entreprise.
Précisons toutefois aussitôt que les ouvriers ne sont pas en reste (leur vie privée n’a d’ailleurs jamais été épargnée par les effets de l’exploitation comme en témoignent les rapports des inspecteurs de fabrique qui ont nourri les analyses de Marx et Engels). C’est alors tout leur corps qui se charge de dire la rémanence des heures pointées dans tous les moments de leur existence, de « l’odeur de rouille qui reste incrustée dans chaque pore, même à la maison »[21] aux nuits d’insomnie passées à imaginer l’irruption de quelque catastrophe, accident du travail ou restructuration[22]. Un corps immobilisé, corseté, anesthésié et absent à lui-même, tel celui de la narratrice des Marchands qui se réjouit de pouvoir à nouveau « vendre [son] temps de vie »[23] dans son usine enfin réouverte mais qui voit son retour au travail bouleversé par un événement qu’elle peine à s’expliquer :
Au bout de plusieurs jours
on découvrit que j’attendais un enfant,depuis déjà de nombreux mois.
Un enfant ?!
Moi ?!Comment cela se faisait-il ?
Que s’était-il bien passé ?Qu’avais-je donc bien pu pouvoir faire pour en arriver là ?
Quelle catastrophe !
Le pire évidemment
c’est que je n’étais pas vraiment sûre
je n’étais plus tout à fait sûre
d’avoir vraiment
fait
ce qu’une femme doit
vivre
pour en arriver
là
[1] Danièle Linhart, La Comédie humaine du travail. De la déshumanisation taylorienne à la sur-humanisation managériale, Paris, Éditions érès, coll. Sociologie clinique, 2015, p. 80-86.
[2] Pierre Girard, « Dans les supermarchés Lidl, des salariés sans vie privée », Libération, 10 avril 2008.
[3] Michel Vinaver, La Demande d’emploi, Paris, L’Arche, 1973, p. 69-70.
[4] Voir Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le Nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, coll. NRF essais, 1999, p. 151.
[5] Michel Vinaver, La Demande d’emploi, op. cit., p. 90.
[6] Falk Richter, For the disconnected child, trad. Anne Monfort, 2013, inédit.
[7] Mike Bartlett, Contractions, trad. Kelly Rivière, Arles, Actes Sud-Papiers, 2012, p. 9.
[8] Love contract est le titre de la pièce radiophonique que Mike Bartlett a adaptée pour la scène sous le nouveau titre de Contractions.
[9] Mike Bartlett, Contractions, op. cit., p. 24-25.
[10] Ibid., p. 25.
[11] Ibid., p. 36.
[12] Michel Vinaver, La Demande d’emploi, Paris, L’Arche, 1973, p. 9.
[13] Ibid., p. 10.
[14] Ibid., p. 18.
[15] Ibid., p. 42.
[16] Rémi De Vos, Conviction intime, dans Sextett. Conviction intime, Arles, Actes Sud-Papiers, 2009, p. 69.
[17] Falk Richter, État d’urgence, trad. Anne Monfort, inédit. Voir Falk Richter, Im Ausnahmezustand, Frankfurt/Main, S. Fischer Verlag, 2007.
[18] Eva Illouz, Les Sentiments du capitalisme, trad. Jean-Pierre Ricard, Paris, Seuil, 2006, p. 18.
[19] Alexandra Badea, Pulvérisés, Paris, L’Arche, 2012, p. 29-30 et p. 41-42.
[20] Falk Richter, Ivresse, trad. Anne Monfort, Paris, L’Arche, 2012, p. 16.
[21] Magnus Dahlström, L’Usine, trad. Terje Sinding, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2001, p. 31.
[22] Ibid., p. 28 et 38.
[23] Joël Pommerat, Les Marchands, Arles, Actes Sud-Papiers, 2006, p. 31.
[24] Ibid., p. 50.